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Mozambique: la victoire du parti au pouvoir confirmée malgré le "chaos" promis par l'opposition
Sans surprise mais avec le risque d'enfoncer le pays dans la crise, le Conseil constitutionnel du Mozambique a validé lundi la victoire définitive du parti historique au pouvoir dans le pays d'Afrique australe où le principal opposant a promis le "chaos" si se confirmait ce scénario.
La contestation post-électorale sans précédent a déjà fait plus d'une centaine de morts et pourrait encore se durcir après l'ultimatum lancé par Venancio Mondlane qui revendique la victoire et dénonce des fraudes.
"La décision du Conseil constitutionnel conduira le Mozambique soit à la paix, soit au chaos", a-t-il menacé, appelant à un "nouveau soulèvement populaire d'une ampleur jamais vue".
Suivant son appel à paralyser le pays, la capitale Maputo a pris des allures de ville fantôme méconnaissable lundi dans les heures précédant l'annonce du Conseil constitutionnel.
Des barricades entravent ses grands axes, les avenues demeurent désertes et les rideaux métalliques des boutiques restent baissés, a constaté une équipe de l'AFP. Des images anormales en pleine période de fêtes de fin d'année.
Les accès au palais présidentiel et au Conseil constitutionnel étaient également bloqués par la police.
Deux mois de manifestations, de grèves et de blocages ont coûté la vie à au moins 130 personnes, pour la plupart des manifestants tués à balles réelles, d'après l'ONG locale Plataforma Decide.
C'est la "contestation post-électorale la plus dangereuse" de l'histoire du pays pour le parti Frelimo, à la tête du Mozambique depuis son indépendance du Portugal en 1975, estime le chercheur mozambicain Borges Nhamirre de l'Institut d'études pour la sécurité de Pretoria.
Malgré les irrégularités soulevées par différentes missions d'observation internationales, le Conseil constitutionnel a confirmé la victoire du candidat du Frelimo avec 65,17% des voix, rabotant seulement son score de 5 points par rapport à la commission électorale en octobre.
A l'Assemblée nationale, le parti conserve une large majorité de 171 sièges sur 250, malgré 24 sièges de moins qu'annoncé en octobre.
L'issue de la décision faisait peu de doute: "Le Conseil constitutionnel n'est pas politiquement indépendant", explique Borges Nhamirre et "il y aura des troubles sans que personne ne soit capable de dire combien de temps ça va durer".
Ces semaines de manifestations ne répondent à aucun schéma habituel dans ce pays parmi les plus pauvres au monde, encore hanté par la guerre civile (1975-1992). La prédominance de l'économie informelle y oblige une grande part des Mozambicains à vivre au jour le jour pour nourrir leur famille.
- Pas de "marchandage" -
"On disait que les mouvements de protestation au Mozambique ne pouvaient pas durer plus d'un mois" mais "ça n'a rien à voir avec ce que nous avions l'habitude d'observer", dit M. Nhamirre.
Cela tient pour beaucoup à Venancio Mondlane qui mobilise ses partisans via des directs rituels sur les réseaux sociaux et refuse tout compromis avec le Frelimo.
Se disant victime de deux tentatives d'assassinat, alors que deux figures de l'opposition ont été abattues en octobre, l'ex-commentateur politique à la télévision mozambicaine est passé dans la clandestinité à l'étranger depuis des semaines.
"Venancio", comme il est simplement appelé dans la rue, a sous-entendu qu'il pourrait faire son retour pour l'investiture.
"Le 15 janvier, on prendra le pouvoir à Maputo", a-t-il affirmé. "Si on doit perdre la vie dans un combat juste, on la perdra". Il revendique 53% des voix selon son comptage parallèle.
"Après un si long mouvement de contestation, cela va au-delà de +Venancio+", estime depuis Maputo Johann Smith, analyste en risques politiques et sécuritaires.
Nombre des 33 millions d'habitants de ce pays parmi les plus inégalitaires tablaient sur ces élections pour tourner la page du Frelimo, parti d'inspiration marxiste du temps de l'indépendance.
"Je peux me tromper mais même s'il se fait tuer ou autre, le mouvement se poursuivra. C'est presque le printemps de l'Afrique australe", juge M. Smith.
Une allusion au recul électoral en Afrique du Sud de l'ANC, parti au pouvoir depuis 1994 contraint à une coalition, puis à la déroute historique au Botswana du BDP qui dirigeait le pays depuis 1966. Autant de camouflets infligés cette année à des partis de libération dans la région.
P.Sousa--PC