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Censure: Barnier sonne l'alarme, sa succession déjà dans les têtes
La censure "rendra tout plus difficile et plus grave", a prévenu mardi Michel Barnier, à la veille du vote d'une motion par la gauche et l'extrême droite qui peut faire tomber son gouvernement et avive déjà les spéculations sur sa succession à Matignon.
L'ambiance agitée dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale quand le Premier ministre s'est exprimé avait aussi un parfum de fin de règne au lendemain du déclenchement du 49.3 pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale, qui a été suivi par le dépôt de plusieurs motions de censure.
Baroud d'honneur ou tentative ultime d'éviter la chute ? Le chef du gouvernement en sursis s'est invité à 20H00 sur TF1 et France 2, où il répondra aux questions d'Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau en direct depuis Matignon, ont annoncé les deux chaînes.
La conférence des présidents de groupe à l'Assemblée a fixé à mercredi 16 heures l'examen des motions de censure déposées par la gauche et le RN. Celle de la gauche, qui sera votée en premier, a toutes les chances d'être adoptée puisque le RN a annoncé la soutenir. En ajoutant leurs voix, la gauche et le RN peuvent réunir autour de 330 suffrages, largement au-delà des 288 requises.
- "Trou noir " -
"Nous aurions probablement parfois pu faire mieux. Mais c'est aujourd'hui de votre responsabilité d'envoyer ce pays dans un trou noir", a lancé la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon aux députés, à l'unisson des ministres qui, dans les médias, ont multiplié les appels à la "responsabilité".
"Est-ce qu'on veut vraiment le chaos ? Est-ce qu'on veut une crise économique qui touchera les plus fragiles ?", a mis en garde le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, faisant même "le pari qu'avec Michel Barnier, nous parviendrons à écarter la motion de censure".
Mais pour la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot, "la chute de Barnier est actée".
Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au "soutien sans participation du RN" et, "ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir", a souligné le député PS Arthur Delaporte.
- "Sans plan derrière" -
Les gestes annoncés par Michel Barnier pour répondre aux exigences du parti à la flamme n'auront toutefois pas suffi: "Censurer ce budget est, hélas, la seule manière que nous donne la Constitution pour protéger les Français d'un budget dangereux, injuste et punitif", a justifié mardi Marine Le Pen sur X.
"Je ne croyais pas qu'elle oserait", a lâché le Premier ministre lundi après une conversation téléphonique avec la cheffe de file des députés RN bien décidée à voter la censure malgré les multiples concessions obtenues, a raconté mardi un président de groupe du bloc central.
"C'est le RN qui a obtenu le plus de gains politiques", mais Mme Le Pen "préfère les sacrifier sur le dos des Français" et "sans plan derrière", déplore-t-on dans l'entourage de M. Barnier. Elle a "un agenda personnel", ajoute-t-on de même source, dans une allusion au procès des assistants du RN au Parlement européen, où Marine Le Pen risque l'inéligibilité.
L'adoption d'une telle motion serait une première depuis le renversement du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.
Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin.
- Spéculations -
Sur les marchés financiers, les taux d'intérêt auxquels emprunte la France se sont tendus face aux incertitudes. Mais la Bourse de Paris évoluait en hausse mardi, les investisseurs se focalisant pour le moment sur les avantages d'un statu quo budgétaire en cas de censure.
L'Élysée n'a fait aucun commentaire sur la nouvelle donne politique, alors qu'Emmanuel Macron est à Ryad pour une visite d'État de trois jours. Mais c'est bien le chef de l'État qui aura rapidement la main car, si le scénario d'une censure se confirme, il devra nommer un nouveau Premier ministre.
Les spéculations vont déjà bon train sur les successeurs potentiels à Michel Barnier, du ministre des Armées Sébastien Lecornu au centriste François Bayrou dans le camp présidentiel.
L'équation reste toutefois la même à l'Assemblée: aucune configuration ne semble promettre une majorité pour faire passer un budget pour 2025.
Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure a appelé Emmanuel Macron à nommer un "Premier ministre de gauche" mais ouvert "au compromis" avec le bloc central, en se disant prêt à prendre ses responsabilités pour Matignon et en rejetant les appels à la démission du chef de l'Etat lancés par Jean-Luc-Mélenchon.
ab-far-lum-are/jmt/dsa
P.Queiroz--PC