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Argentine: un journaliste grièvement blessé dans une manifestation de retraités
Un photojournaliste argentin est sorti jeudi d'une chirurgie d'urgence à la tête qui, selon son père, lui a "sauvé la vie", après avoir reçu la veille un tir de projectile alors qu'il couvrait une marche pour la défense des retraités à Buenos Aires, qui a dégénéré en affrontements entre police et manifestants.
Dans ces heurts, parmi les plus violents en 15 mois de présidence de Javier Milei, des pierres et projectiles divers ont visé la police, qui a fait usage de balles en caoutchouc, de canons à eau et de gaz lacrymogène à de nombreuses reprises pour repousser les manifestants, venus par centaines, sur la place du Parlement et devant la Casa Rosada, siège du gouvernement national.
Agé de 35 ans, le journaliste indépendant a été touché à la tête par un projectile alors qu'il prenait des photos de la manifestation mercredi, comme le montre un vidéo relayée sur les réseaux sociaux.
Transporté dans un hôpital de la capitale, il a subi une chirurgie qui "lui a sauvé la vie", a déclaré jeudi matin son père Fabian Grillo à la chaîne de télévision locale C5N. "Le processus de récupération possible commence", a-t-il ajouté, en précisant qu'une autre intervention était prévue dans la journée "pour mesurer la pression de l'autre côté du cerveau".
Les proches du journaliste attribuent la blessure à la police, à un tir tendu de capsule de gaz lacrymogène.
Depuis des années, chaque mercredi à Buenos Aires, les retraités - parfois juste quelques dizaines, parfois plus - se mobilisent contre la dégradation de leur pouvoir d'achat de longue date, en particulier une chute brutale aux premiers mois de la présidence de l'ultralibéral Milei.
Cette fois, des supporters de divers clubs de football du pays s'étaient joints à la manifestation. A la fois pour appuyer les revendications de leurs aînés, et protester contre la dureté de la réponse policière lors des mercredis précédents, notamment lorsqu'un vétéran d'un club de supporters a été blessé.
Quelques syndicats et organisations de gauche radicale étaient également présents.
- "Accident imprévu" ou "cibles" -
Le maire de Buenos Aires, Jorge Macri, a estimé lors d'une conférence de presse jeudi que les troubles observés la veille étaient le fait de "groupes violents très organisés" ayant causé des dommages évalués à 260 millions de pesos (environ 225.000 euros).
La ministre de la Sécurité, Patricia Bullrich, a estimé jeudi lors d'une autre conférence de presse que les fauteurs de troubles appartiennent à "différents secteurs qui cherchent la déstabilisation totale et absolue" du gouvernement. Elle a évoqué des "hooligans" détenteurs d'armes blanches et d'armes à feu, et entend "demander aux clubs de football (...) qu'ils expulsent tous leurs membres qui ont participé à la marche".
Le chef de cabinet de Javier Milei, Guillermo Francos, a lui comparé la manifestation à "une sorte de coup d'Etat" et parlé de la blessure infligée à Pablo Grillo comme d'un "accident imprévu".
Jeudi après-midi, des photographes se sont réunis devant le Parlement, brandissant leurs appareils pour exiger la démission de Mme Bullrich.
"Nous devons exiger de l'Etat qu'il garantisse le droit de manifester et la liberté d'expression", a déclaré le secrétaire général du syndicat des journalistes de Buenos Aires, Agustín Lecchi.
L'Association des reporters graphiques d'Argentine (ARGRA), au sein de laquelle Pablo Grillo a suivi des études, a condamné que les photo-reporters soient "des cibles à réprimer" aux yeux du ministère de la Sécurité.
En plus de Pablo Grillo, une vingtaine de journalistes qui couvraient la manifestation ont été touchés par des balles en caoutchouc tirées par les forces de l'ordre, selon l'association.
Sur les 124 personnes arrêtées, 114 ont été libérées jeudi matin par une juge qui a estimé que les informations concernant leur interpellation étaient "imprécises", dépourvues de données "relatives au délit spécifique" censé avoir été commis.
Une décision vivement critiquée par la présidence argentine. "Ceux qui militent pour l'impunité à chaque décision sont également complices", a réagi son porte-parole Manuel Adorni.
F.Santana--PC