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Italie: Matteo Salvini relaxé dans son procès pour séquestration de migrants en mer
Le vice-Premier ministre italien d'extrême droite Matteo Salvini, qui encourait plusieurs années de prison pour avoir bloqué en mer un navire à bord duquel se trouvaient des migrants secourus en Méditerranée, a crié victoire après avoir été relaxé vendredi en première instance.
Chef de La Ligue, parti anti-immigration membre de la coalition ultraconservatrice de Giorgia Meloni actuellement au pouvoir à Rome, Matteo Salvini, 51 ans, répondait d'abus de pouvoir et de privation devant le tribunal de Palerme, en Sicile.
Il était jugé pour avoir retenu en mer 147 personnes secourues sur le navire humanitaire Open Arms en août 2019, alors qu'il était ministre de l'Intérieur d'un précédent gouvernement, refusant de les laisser débarquer en Italie.
Les migrants avaient finalement été autorisés à débarquer sur l'île italienne de Lampedusa à la suite d'une décision de justice.
"Le tribunal de Palerme (...) relaxe Matteo Salvini des faits qui lui sont reprochés, le délit n'étant pas établi", a déclaré le juge Roberto Murgia, sans motiver sa décision.
L'annonce a été accueillie par les applaudissements des soutiens du dirigeant nationaliste dans la salle d'audience, selon des journalistes de l'AFP sur place.
"Après trois années (de procès), le bon sens a gagné, La Ligue a gagné, l'Italie a gagné", a réagi Matteo Salvini. "Défendre les frontières, défendre la patrie, lutter contre les passeurs, les trafiquants, les ONG étrangères et protéger nos enfants n'est pas un délit mais un droit".
- "Instrumentalisation des migrants" -
Son avocate, Giulia Bongiorno, a dénoncé dans une ultime plaidoirie "l'instrumentalisation des migrants pour combattre des ministres ne plaisant pas à une certaine partie de l'opinion politique" en Italie, reprenant implicitement les diatribes récurrentes de son client contre les "juges politisés".
Malgré leurs différends personnels, la Première ministre italienne Giorgia Meloni, dont l'exécutif a également dressé des obstacles juridiques sur la route des navires-ambulances, a pris fait et cause pour lui. Vendredi soir, elle a salué "une bonne nouvelle".
M. Salvini a aussi reçu le soutien de plusieurs dirigeants et personnalités étrangers, dont le Premier ministre hongrois Viktor Orban, le milliardaire américain Elon Musk et la députée française d'extrême droite Marine Le Pen. Cette dernière s'est déclarée "soulagée" après le jugement.
De son côté le fondateur d'Open Arms, Oscar Camps, a assuré que l'ONG espagnole continuerait "sa mission en mer", et étudierait l'opportunité d'interjeter appel.
- "Ports fermés" -
Ancien sécessionniste lombard qui a peu à peu fait glisser son parti vers l'extrême droite, Matteo Salvini avait mis en œuvre en 2019, au sein du gouvernement dirigé par Giuseppe Conte (Mouvement Cinq Etoiles, centre), une politique des "ports fermés".
L'Italie refusait alors l'entrée aux navires humanitaires qui secouraient les migrants effectuant la traversée, souvent mortelle, depuis les côtes nord-africaines.
L'équipage de l'Open Arms a témoigné que la santé physique et mentale des migrants à bord du navire bloqué en mer avait atteint un point critique, avec des conditions sanitaires désastreuses, dont une épidémie de gale.
Pour M. Salvini en revanche, "la situation n'était pas dangereuse".
Ce procès se conclut alors que le gouvernement Meloni est en butte aux juges sur sa propre politique migratoire.
Des magistrats se sont en effet opposés à ses tentatives d'accélérer le traitement des demandes d'asile, notamment dans deux nouveaux centres gérés par l'Italie en Albanie.
Son gouvernement a également limité les activités des navires de sauvetage civils, les accusant d'encourager l'immigration, ce qui, selon les observateurs, n'est pas prouvé.
La justice avait pu poursuivre M. Salvini après la levée de son immunité parlementaire par le Sénat italien en 2020.
Une procédure similaire, dans laquelle il était poursuivi pour avoir refusé à 116 migrants de débarquer du bateau des garde-côtes italiens Gregoretti en juillet 2019, a été abandonnée en 2021.
Marginalisés depuis par Mme Meloni et son parti post-fasciste Fratelli d'Italia, M. Salvini et La Ligue, qui avaient créé la suprise en 2019 en raflant 34% des suffrages aux élections européennes, ne sont plus aujourd'hui qu'une force d'appoint de l'exécutif.
M. Salvini s'est présenté en victime des magistrats en espérant "raviver son potentiel politique en déclin, et lui permettre de rassembler autour de lui un consensus populaire", selon Anna Bonalume, autrice de l'essai "Un an avec un populiste" sur M. Salvini. Sa relaxe annihile en grande partie cette stratégie.
P.Mira--PC